• 8 aout 1925 13 enfants perdent la vie sur la plage de Saint-Étienne-au-Mont (62)

    • Relevé sur les Affiches d'Angers du dimanche 9 aout 1925

     

    • Relevé sur les Affiches d'Angers du lundi 10 aout 1925

     

    • Relevé sur les Affiches d'Angers du mardi 11 aout 1925

                                                                           

    • Relevé sur les Affiches d'Angers du mercredi 12 aout 1925

     

     

     

    • Relevé sur les Affiches d'Angers du jeudi 13 aout 1925

    Le flot charmeur a volé la vie de 13 enfants sur la plage de Saint-Étienne-au-Mont

     

     

    C'est le samedi 9août 1925, sur la plage d'Ecault, que treize enfants ont péri après avoir été emportés par une lame de fond.
    C'est le samedi 9août 1925, sur la plage d'Ecault,
    que treize enfants ont péri après avoir été emportés par une lame de fond.

     

    Qu'ils étaient heureux ces enfants en débarquant à Condette pour un séjour sur la Côte d'Opale. Une colonie de vacances, comme on disait à l'époque, organisée par les tissages Leclerc-Dupire de Wattrelos à l'intention des enfants des ouvriers de leur usine.

    Ces garçonnets, fils d'humbles ménages de cette grande cité industrielle aux abords de Roubaix, débordaient de joie à l'idée de voir bientôt la mer.

    Un temps lourd mais une mer calme
    Ah ! la mer. Que de fois ils en avaient rêvé, un rêve quelque peu inaccessible. Ils se la représentaient de mille manières et leur impatience grandissait maintenant qu'ils étaient si près d'elle.
    Il leur fallut pourtant attendre le samedi 9 août de cette année 1925 pour entendre le responsable du groupe, le Père Delaporte, leur annoncer le départ pour la promenade en direction des dunes et de la plage à Ecault, entre Equihen et Hardelot.
    Le temps était lourd et chaud, ce jour-là, mais la mer était calme. Près de la moitié des enfants demandèrent l'autorisation de prendre un bain. Le prêtre hésita bien un peu mais il n'avait vraiment aucune raison de ne pas accéder à leur requête.
    Pour s'ébattre dans l'eau, les garçonnets, tous âgés d'une dizaine d'années, portèrent leur choix sur un endroit où la plage était un peu surélevée, une sorte de promontoire bordé par ces dépressions, appelées "bâches" dans le Boulonnais, qui sont particulièrement dangereuses surtout à marée montante.
    Or, la mer montait. Elle montait même très vite. Prenant conscience du danger, le prêtre et les surveillants sifflèrent la fin de la baignade et enjoignirent aux enfants de regagner le rivage au plus tôt.

    Une vision d'enfer
    Si les bambins avaient pu garder leur sang-froid, ils eussent évacué le promontoire sur le côté parallèle à la côte mais, malgré les avis répétés et impuissants de leurs accompagnateurs qui étaient au bain avec eux, ils se précipitèrent droit devant eux. Ils devaient fatalement tomber dans la bâche. Et ils y tombèrent.
    D'après le récit de témoins, le chroniqueur d'un journal local raconta le déroulement de la tragédie qui se préparait. « Les premiers garçonnets tombèrent, dit-il. Alors la panique s'empara des enfants. Ils entraînèrent leurs camarades qui les suivaient et s'étaient accrochés à eux, désespérément. Ce fut pendant quelques instants une vision d'enfer : des têtes, des bras qui s'agitaient au-dessus de l'eau puis disparaissaient, des cris affolés, des appels suprêmes qui n'avaient plus rien d'humain. Courageusement leurs surveillants auxquels s'étaient joints d'autres sauveteurs bénévoles plongèrent et s'efforcèrent de ramener les enfants à flot mais ceux-ci étaient très nombreux et s'ils réussirent à sauver quelques-uns, la plupart hélas ! avaient sombré définitivement ».

    La mer rend les petits corps un à un
    Des estivants qui avaient aperçu le drame vinrent prêter main-forte. Longuement, tous explorèrent la bâche. Après de multiples tentatives, il fallut se rendre à l'évidence. Tous les efforts étaient devenus inutiles. Huit enfants avaient été repêchés ; ils furent transportés en toute hâte à Hardelot où des soins intensifs réussirent à en rappeler quatre à la vie mais pour les quatre autres, la mort avait fait son oeuvre.
    Pendant ce temps, les enfants ayant décidé de rester sur les dunes avaient suivi avec horreur la tragédie qui se déroulait sous leurs yeux. Affolés, ils s'enfuirent dans le massif dunaire, errant au gré d'une fantaisie qu'ils étaient incapables de contrôler. On en retrouva quelques-uns dans les villas du littoral où ils avaient trouvé refuge mais le soir venu, à Condette, c'était toujours l'incertitude sur le nombre de disparus.
    Le lendemain, dimanche, les recherches continuèrent sur la plage. Elles amenèrent la découverte de deux cadavres, puis, un peu plus tard, on releva encore deux autres petits corps inanimés. En début d'après midi, avec la marée, la mer meurtrière rejeta, du côté d'Equihen, deux autres enfants qu'elle avait engloutis et un nouveau dans la soirée. On pouvait alors fixer à treize le nombre des victimes.

    Piégés par une lame de fond
    On juge de la douleur des parents quand ils apprirent la triste nouvelle. Et ce fut une scène d'intense émotion quand ils furent mis en présence des corps inanimés de leurs enfants.
    Les autorités s'attachèrent à déterminer les éventuelles responsabilités d'une telle catastrophe. Le flot fut déclaré seul responsable car c'est l'arrivée inopinée d'une lame de fond qui provoqua l'accident. De fait, cette lame de fond a été ressentie sur une grande partie de la côte entre Camiers et Ambleteuse. Elle a aussi déferlé en rade de Boulogne au point que la frégate de guerre argentine "Presidente Sarmiento" qui entrait au port fut considérablement déportée par le formidable remous de l'eau.
    Les choeurs de Lyriade 62 ont inscrit à leur répertoire une valse lente faisant référence à cette tragédie de Saint-Étienne-au-Mont. En trois couplets et autant de refrains, cette tarentelle parle « du flot charmeur qui a encore fait pleurer les yeux, du flot voleur qui a pris treize petits fieux, du flot berceur qui a trompé même les vieux qui ne voient plus qu'avec horreur le flot menteur ».

    André VERLET

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